Aux Etats-Unis, les ovnis font la Une
Jamais depuis leur apparition mediatique en 1947 marquee par l’observation de Kenneth Arnold, les ovnis n’avaient ete aussi presents à la Une des journaux americains, un engouement qui n’a pas encore traverse l’Atlantique malgre le succès de la serie «OVNIs » inspiree du Geipan.
Pourquoi cet interêt subit de la presse ? Parce que la question des ovnis, jusqu’à present reservee aux amateurs et traitee avec condescendance par la majorite des scientifiques, est devenue, pour le meilleur ou pour le pire, un sujet eminemment militaire et politique.
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La situation a commence à evoluer en 2017 avec la parution dans le New York Times d’une serie d’articles et de temoignages de militaires evoquant leurs rencontres avec des PANs, phenomènes aeriens non identifies selon la terminologie desormais en vigueur. Ces recits sont etayes par plusieurs videos d’objets volants aux performances etourdissantes dont l’authenticite est confirmee par le Pentagone.Au cours de la même periode, le public americain decouvre l’existence du programme secret Advanced Aerospace Threat Identification Program (programme d’identification des menaces aerospatiales avancees) cree en 2007 par le chef de la majorite democrate au Senat, Harry Reid, et finance à hauteur de 22 millions de dollars afin d’etudier les PANs. Arrête en 2012, il aurait toutefois ete poursuivi sous la nouvelle appellation de Unidentified Aerial Phenomenon Task Force, groupe de travail sur les phenomènes aeriens non identifies.Parallèlement, un nouveau lobby travaille activement à «faire eclater la verite», To the Stars Academy of Arts and Science, fondee par Luis Elizondo, l’ancien employe du Pentagone qui etait en charge du programme Advanced Aerospace Threat Identification Program. Il a demissionne en 2017 en denonçant la volonte persistante des autorites de maintenir le sceau du secret sur les ovnis. Très vite, cette «academie» est devenue un acteur central de l’ufologie etatsunienne grâce en particulier à l’entregent de son fondateur qui lui permet de devoiler les trois premières videos des incidents mettant aux prises des pilotes de chasse bases sur les porte-avions Nimitz et Theodore Roosevelt avec des PANs, en 2004, 2014 et 2015. Elles ont ete suivies par plusieurs autres comme celle ci-dessous qui aurait ete filmee à bord de l’USS Omaha le 15 juillet 2019.
Tous ces elements libèrent la parole des politiques et de hauts responsables de l’armee et du renseignement. Ils multiplient les declarations chocs recensees par le Washington Post qui consacre un long article à ce changement d’ambiance autour des ovnis : le mois dernier, le senateur republicain de Floride Marco Rubio declare sur CBS : «Je ne pense pas que nous devons laisser la stigmatisation nous empêcher d’obtenir une reponse à la question fondamentale des PANs». L’ancien directeur de la CIA John Brennan accorde une interview au site Black Vault specialise dans le paranormal et confie : «Je ne suis pas aussi sceptique à propos des ovnis que je l’etais il y a quelques annees, c’est le moins qu’on puisse dire!».
Même les presidents s’en mêlent comme Barack Obama, qui confirme sur CBS l’existence d’enregistrements d’objets aeriens inexplicables et Donald Trump qui, en 2020 sur ABC News, avait lâche, à propos de l’affaire Roswell dans son style qui n’appartient qu’à lui : «Je ne vous parlerai pas de ce que j’en sais, mais c’est très interessant», juste un an après avoir affirme qu’il ne croyait «pas particulièrement» aux ovnis.
Nous parvenons à nous rassembler dans une approche bipartisane autour de ce qui relevait il y a peu des theories du complot
Une volte-face discrète mais exemplaire d’un changement de ton general, aussi bien côte democrate que republicain. Ce qui fait dire au Washington Post que les ovnis sont presque parvenus à realiser le rêve de ceux qui croyaient dans les annees 50 et 60 que nos «frères de l’espace» venaient apporter la paix dans le monde. Car, bien qu’il reste du travail en vue de ce vaste projet, les phenomènes aeriens non-identifies semblent avoir fourni une bouffe d’oxygène à la politique americaine qui en avait bien besoin : «Le pays est divises sur des faits de base – comme le reel vainqueur de l’election presidentielle de 2020 (Biden) – tandis que les deux partis politiques ne parviennent même pas à s’entendre sur la definition d’«infrastructure». Pourtant, en ce qui concerne les PAN, il y a un consensus bipartisan aussi bien chez les politiques que dans le grand public sur l’idee que «la Verite est là» pour paraphraser le slogan d’X Files» ecrit le quotidien.
Adam Jentleson, ancien collaborateur d’Harry Raid, confirme en soulignant le paradoxe de la situation : «Je ne peux pas dire si cela augure en bien ou en mal de l’avenir de notre democratie, mais il y a une certaine ironie dans le fait que nous parvenons à nous rassembler dans une approche bipartisane de de ce qui relavait il y a peu de theories du complot.»
Une progression de plus de 15% des observations d’ovnis aux Etats-Unis
C’est donc dans une ambiance sinon sereine du moins apaisee qu’est attendu le rapport officiel synthetisant les donnees (non classifiees) recueillies par les differentes agences gouvernementales et par la Unidentified Aerial Phenomenon Task Force.
Pour le New York Times, il ne faut cependant pas esperer des revelations fracassantes de ce document qui devrait être rendu public dans le courant du mois de juin: «Le rapport est cense signaler tout phenomène aerien non identifie qui pourrait être considere comme une menace pour la securite nationale et determiner s’il peut être attribue à un ou plusieurs adversaires etrangers. En outre, il fournit une description detaillee d’un processus interagences pour la collecte et l’analyse des ovnis ainsi que des recommandations pour ameliorer et financer la collecte de donnees et la recherche», resume le quotidien.
Troublante coïncidence, ce rapport tombe alors que l’on a note au cours de l’annee ecoulee une forte augmentation du nombre de signalements d’ovnis aux Etats-Unis avec une progression de plus de 15%, sans que l’on sache precisement le rôle joue par les mois de confinement qui ont laisse aux Americains plus de temps pour observer le ciel.